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RÉSUMÉ BIOGRAPHIQUE DE JOSEPH MERKLIN
par Michel Colin


Né en 1819 à Oberhausen (Allemagne, non loin de Fribourg ou Sélestat), mort à Nancy en 1905 .

1837 : apprentissage chez Friedrich Hass (venant de chez le facteur Walcker de Ludwigsburg).
1838 : apprentissage chez son père Franz Josef à Fribourg-en-Brisgau
Embauche de Friedrich Schütze (issu lui aussi de l’atelier Walcker), qui devient son beau-frère en 1841.
1840 : Effectue un stage de 6 mois chez Walcker, ensuite chez Wilhelm Korfmacher à Linnich.
1843 : ouvre son propre atelier à Ixelles-les-Bruxelles (Belgique) et embauche Pierre Schyven.
1847 : début de l’association Merklin-Schütze, ils livrent en 1852 l’orgue de St Barthélémy de Liège (35 jeux, III claviers), au cœur de la querelle avec François-Joseph Fétis, théoricien organologue en 1850.
1853 : Société en commandite Joseph Merklin Schütze et Compagnie. Il commence à fabriquer des harmoniums dont certains, sophistiqués, à double soufflerie, les Orchestriums.
1854-1857 : Création d’une succursale à Paris et construction de l’orgue de la cathédrale de Murcie en Espagne, (62 jeux, IV claviers).
1855 : rachat de la maison parisienne Ducroquet-Barker, elle-même issue de la faillite de Daublaine et Callinet (1834-1845), qui était la plus importante maison de facture française avec 80 ouvriers, Merklin est à l’Exposition Universelle et présente un orgue très remarqué à l’époque.
1856 : vente de l’orgue de l’exposition à St Eugène à Paris (35 jeux, III claviers).
1858 : création de la Société Anonyme pour la fabrication de grandes orgues ; déménagement définitif à Paris. Les ouvriers sont nombreux, on y compte Akerman dès 1854 (qui deviendra en Suède un facteur de premier ordre), Verschneider, Barker, Claus en 1859 (qui s’installera par la suite en Bretagne), Goll en 1865 (qui s’installera en Suisse ensuite), Ghys (qui créera sa propre firme à Dijon).
1860-1866 : construction de l’orgue du Palais Ducal de Belgique à Bruxelles (32 jeux sur II claviers étendu par la suite à 54 jeux sur IV claviers).
1867 : Merklin présente à l’Exposition Universelle un orgue placé ensuite à St Epvre de Nancy ; le facteur d’orgues est décoré du titre de Chevalier de la Légion d’Honneur.
1870 : Merklin se fixe à Paris, quitte la Société Anonyme (dissoute en 1873), pour fonder une nouvelle manufacture, Joseph Merklin et Compagnie, 22, rue Delambre. Du fait de la guerre franco-prussienne, il s’exile en Suisse à Martigny jusque 1872, à cause de sa nationalité allemande, puis se fixe à Lyon et engage comme harmoniste Vogt ainsi que Charles Félix Michel, son futur gendre (né en 1849, qui épouse sa fille Marie-Alexandrine en 1875). Il a remarqué que depuis 1841, le rite lyonnais a évolué et autorise l’usage de l’orgue, ce qui va lui permettre de se placer aux premières loges et obtenir la quasi totalité des marchés lyonnais ou de la région Rhône-Alpes.
1875 : Joseph Merklin obtient la nationalité française.
1876-1879 : l’orgue de St Eustache à Paris leur est confié, (72 jeux sur IV claviers), apparaît la Société Merklin et Compagnie.
1884 : est construit à l’église réformée de Lyon (29 jeux sur II claviers), le premier orgue totalement électrique de la firme (les premiers essais de Barker et Peschard en 1865 eurent lieu à Salon de Provence).
1886 : orgue électrique à double console (44 jeux dont 10 pour la section « orgue de chœur »)
à St Nizier de Lyon.
1889 : 3ème orgue électrique issu de la maison à Notre-Dame de Valenciennes (42 jeux dont 11 pour la section «orgue de chœur»).
1894 : suite à des tensions avec son gendre Charles Michel, auquel il interdit de reprendre le nom de Merklin, il quitte la Société Merklin, la dissout, en recrée une avec les anciens contremaîtres Joseph Gutschenritter et Philippe Decock à Paris, seule la marque J. Merklin et Compagnie est autorisée, mais son gendre n’en a cure et crée «Charles Michel-Merklin», ce qui déroute la clientèle.
1896 : brevet pour un système de transmission pneumatique tubulaire mis en service à Boulogne-sur-mer en 1897.
1898 : Joseph Merklin, fatigué, quitte Paris pour Nancy où il décédera en 1905.
1902 : fin de la firme Charles Félix Michel Merklin (Charles Michel décède à Lyon en 1926), en pleine déconfiture, elle sera reprise par le suisse Kuhn dès 1905 (Michel-Merklin et Kuhn).

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Le nom de Joseph Merklin, sous la forme « J. Merklin et C
ie », continuera à être utilisé par ses véritables successeurs, avec l’atelier parisien, auxquels le vieux Joseph a cédé ses parts en 1898.

La société dite couramment Michel-Merklin et Kuhn restera donc sur Lyon, sans aucun rapport commercial direct avec celle de Paris.

Cet imbroglio de dénominations et la rapidité avec laquelle les sociétés portant le nom de Merklin se font et se défont rendent la compréhension et l’analyse historique difficiles. Une partie des archives a toutefois pu être sauvée par l’entremise éclairée du jeune facteur d’orgues Olaf Dalsbaek, qui sauva de la destruction une documentation précieuse et unique et a depuis l’obligeance d’en faire profiter les professionnels, dans un louable souci de diffusion patrimoniale.
Par ces archives, nombre de questions techniques ou historiques ont trouvé réponse.
Son entreprise reste actuellement la seule détentrice autorisée à utiliser le nom de Merklin.

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On peut retenir de Joseph Merklin qu’il a été un chercheur ambitieux ne dédaignant pas le risque, que ses orgues montrent des influences esthétiques surprenantes, passant d’instruments romantiques allemands à des influences hyspaniques (chamades de Murcie), des innovations techniques éprouvées parfois encore valides de nos jours (machines Barker, électricité dans les transmissions et doubles consoles de commande, systèmes pneumatiques, jeux à anches libres jusque vers 1875) face à la lourde concurrence de ses confrères, en premier lieu Cavaillé-Coll. Il est probable que son ascendance allemande (d’après ses écrits, il semblerait, malgré ses efforts d’intégration, qu’il ait toujours eu quelques soucis avec la langue française) a joué contre lui par rapport au chauvinisme exacerbé dans des périodes politiques difficiles. Il a toutefois reçu le soutien et les encouragements de nombreux musiciens mais a sans doute besoin d’être encore étudié, orgue par orgue, pour mieux comprendre la diversité des influences et des techniques, donc des résultats sonores.

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Sources  sommaires :
-inventaire national des orgues du Rhône, 1992
-communications et aimables contributions de Paul Cartier, Thierry Corréard, Olaf Dalsbaek
-« Joseph Merklin, facteur d’orgues européen » de Michel Jurine, 1991
-plaquettes ou études diverses sur des ouvrages de Merklin.